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Littérature du 20e siècle
1900 < year < 2001 -
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1800 < year < 1901 -
Littérature 18e siècle
1700 < year < 1801 -
Littérature 17e siècle
1600 < year < 1701 -
Magazine Vogue France
BNF: https://data.bnf.fr/fr/34383356/vogue__paris_/ -
Auteures féminines
George Sand: https://data.bnf.fr/fr/11923601/george_sand/ (ISNI 0000 0001 2130 9531) Madame de Staël: https://data.bnf.fr/fr/11925397/germaine_de_stael-holstein/ (ISNI 0000 0001 2259 1946) Daniel Stern: https://data.bnf.fr/fr/16429508/daniel_stern/ -
Intermédialité et transmédialité du livre
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Pratiques narratives émergentes
Une brève histoire des systèmes d'écriture et d'inscription
Introduction
« L’information se développe de façon si démentielle autour de nous et les technologies de l’information évoluent à une vitesse si époustouflante que nous nous trouvons confrontés à un problème essentiel : comment nous orienter dans ce nouveau paysage ? Que deviendront, par exemple, les bibliothèques universitaires face à des merveilles technologiques comme Google ? Comment donner du sens à tout cela ? Je n’ai pas de réponse à ce problème mais je peux suggérer une façon de l’aborder : observons l’histoire des modes de communication de l’information. » (Darnton, 2011, p. 71)
Avant le livre : l’écriture et ses premiers supports
Des pictogrammes à l’écriture alphabétique
La forme picto-idéographique renvoie à des images simplifiées qui désignent êtres et choses
Avant le livre : l’écriture et ses premiers supports
Des pictogrammes à l’écriture alphabétique
La forme picto-idéographique renvoie à des images simplifiées qui désignent êtres et choses
Avant le livre : l’écriture et ses premiers supports
La « raison graphique »
L’étude des systèmes d’écriture menée par l’anthropologue anglais Jack Goody (1919- 2015) met en évidence une spécificité de la pensée écrite et du savoir graphique : loin d’être la transcription d’énoncés oraux, l’écriture engage un jeu sur les structures et les éléments (les lettres et les mots), et un travail d’organisation du savoir en catégories. L’écriture va faire émerger un système de pensée et va permettre, le développement de la pensée logique, de l’abstraction et finalement de la science
« [...] Toi qui es le père de l’écriture, tu lui attribues, par complaisance, un pouvoir qui est le contraire de celui qu’elle possède. En effet, cet art produira l’oubli dans l’âme de ceux qui l’auront appris, parce qu’ils cesseront d’exercer leur mémoire : en mettant, en effet, leur confiance dans l’écrit, c’est du dehors, grâce à des empreintes étrangères, et non pas du dedans, grâce à eux-mêmes, qu’ils feront acte de remémoration. » (Platon, Derrida, & Brisson, 2008, 274e-275b)
Nombreux sont ceux qui, comme Platon, ont pu craindre qu’en déléguant notre mémoire à l’écrit et à ses supports - dont la pérennité n’est jamais garantie - la transmission de notre culture serait menacée. Une quantité très infime de textes antiques sont parvenus jusqu’à nous - et presque aucun sur son support original : la plupart des textes anciens que nous connaissons nous ont été transmis par le biais de manuscrits médiévaux, bien plus tardif. Ceux-ci sont des copies de copies, souvent en partie erronées, ou même tronquées et manipulées.
Les supports de l’écrit
Le premier support du livre fût probablement le bois. Sur le plan étymologique, le tout premier sens des mots utilisés pour désigner le livre (en grec, biblos, et en latin, liber) signifie : écorce d’arbre
Plusieurs supports ont servi à accueillir l’écriture : l’ardoise, les briques, l’ivoire, l’os, des métaux divers, les tissus, le cuir…
Le papyrus et le volumen
Tout comme l’écriture a déterminé un certain système de pensée, la forme du volumen a déterminé des pratiques de lecture spécifiques et relativement complexes : en particulier, il imposait une lecture continue du texte. Les termes étaient souvent liés entre eux, sans espaces. Le texte lui-même était divisé en colonnes verticales et presque toujours écrit d’un seul côté, celui du sens horizontal des fibres. Le titre se trouvait à la fin, parfois à l’intérieur, ou encore sur une étiquette pendant du cylindre enrouleur. Le volumen était donc assez peu pratique, il rendait difficile le travail de recherche et de repérage.
« Retrouver un passage au sein d’un rouleau s’avère une tâche ardue qui sollicite la mémoire vive du lecteur. Afin de repérer, par exemple, le locus d’un passage au sein d’un manuscrit, les contraintes matérielles du support imposent le maintien des pratiques de mémorisation qui opèrent la cartographie mentale du savoir. » (Bourassa, 2005, p. 23)
Le temps des manuscrits
L’invention du livre : le codex
Le codex a représenté une mutation fondamentale dans l’histoire du livre, mais aussi dans notre histoire culturelle. Il met en place une architecture de l’information qui est encore sensiblement la nôtre à l’heure actuelle. La façon dont nous construisons notre pensée est influencée par la façon dont le livre est construit dans sa matérialité et, par la même occasion, construit un raisonnement.
Transformation de l’expérience de lecture : l’architecture de l’information
Des pictogrammes à l’écriture alphabétique
Le codex a transformé l’expérience de la lecture : nouvel élément du livre, la page apparait comme une unité de perception à part entière. Les scribes, tout comme les lecteurs, se sont approprié peu à peu cette surface. L’espace du livre se met peu à peu en place : les lecteurs peuvent désormais feuilleter un texte clairement articulé, qui produit aussi des mots séparés par des espaces et même des paragraphes et des chapitres. Bientôt apparaîtront des tables des matières, des index et d’autres outils destinés à orienter le lecteur
Les scriptoria : la fabrique des manuscrits médiévaux
À mesure que l’institution ecclésiastique se sécularise, les monastères et leurs scriptoria s’organisent en véritables réseaux oeuvrant à la diffusion des textes religieux, à commencer par La Bible, mais aussi des écrits profanes plus anciens qui permettent de perpétuer la connaissance du latin. Ces réseaux de fabrication du livre vont jouer un rôle essentiel dans l’uniformisation de la pensée basée sur la religion chrétienne.
Des pièces uniques
Chaque manuscrit est par essence une pièce unique. Le copiste ne peut s’empêcher de modifier insensiblement le texte, de manière involontaire, en faisant par exemple des fautes de copie, ou délibérée : les textes profanes, parfois jugés trop licencieux, peuvent être « moralisés » par le copiste. De ce point de vue, les textes transmis au Moyen âge se caractérisent par une très forte instabilité.
Le palimpseste
Un palimpseste est un manuscrit constitué d’un parchemin déjà utilisé, dont on a fait disparaître les inscriptions pour pouvoir y écrire de nouveau. En raison du coût élevé du parchemin, une telle pratique était très courante. Par effet de transparence, les textes effacés (dont l’encre a été grattée) sont parfois encore visibles. Angelo Mai, préfet de la bibliothèque de manuscrits du Vatican, retrouva au XIXe siècle des parties du manuscrit perdu de Cicéron, De Republica, en consultant un ouvrage d’Augustin d'Hippone. L’anecdote est restée célèbre dans le monde des bibliothécaires.
La mutation du livre : l’imprimerie
L’invention de l’imprimerie : contexte socio-historique
Avec l’imprimerie, un procédé manuel est remplacé par un procédé mécanique, avec l’espoir que le livre sera construit de façon plus rapide, plus fiable et que les textes seront plus nombreux à circuler. Désormais, tous les livres imprimés peuvent être reproduit de façon identique... du moins en théorie.
Le premier siècle de l’imprierie : les incunables
Les premier imprimeurs ont imité la présentation du manuscrit, non pour « tromper la clientèle » , mais simplement parce qu’ils ne pouvaient concevoir une autre forme du livre que celle qu’ils connaissaient. Le livre moderne demeure encore à inventer. Le manuscrit médiéval reste pendant plusieurs décennies le modèle de référence. On appelle incunables (du latin incunabula, qui signifie « le berceau » ) les livres imprimés jusqu’à 1500 inclusivement.
Dans un esprit de remédiation, les incunables reproduisent donc l’écriture des manuscrits. Les potentialités de la typographie restent encore à découvrir. Sur la page, le texte est encore très dense, présenté sur deux colonnes, de temps en temps coupé par quelques lettres ornées et des pieds de mouche qui indiquent les paragraphes. Comme les manuscrits, les premiers imprimés ne comportent pas de titre, mais sont désignés par les premiers mots du texte , soit l’incipit. Cette absence d’informations paratextuelles ne facilite par la datation et la localisation de beaucoup d’incunables.
Cependant, les premiers imprimeurs prirent rapidement l’habitude d’ajouter à la fin du volume une formule indiquant, en quelques lignes, l’auteur et le titre de l’ouvrage, le lieu et la date de l’édition, le nom de l’imprimeur. On appelle ces quelques lignes le colophon, dont l’étymologie provient du grec « achever » . Ce colophon était souvent accompagné de la marque de l’imprimeur, qui va bientôt servir à lutter contre les contrefaçons.
Une invention européenne ? Les précédents chinois (la xylographie)
S’il est encore fréquent en Occident d'attribuer à Gutenberg l'invention de l'imprimerie, on sait pourtant que c’est en Asie que les premiers textes ont été reproduits mécaniquement. Dès le VIIe siècle, les chinois pratiquent la xylographie, un procédé qui consiste à graver un texte ou une image sur un panneau en bois, avant de remplir ces gravures d’encre pour produire une impression sur papier ou tissu. Aussi, Gutenberg n’a pas inventé l’imprimerie à caractères mobiles, mais un ensemble de techniques conjointes pour rendre la technique plus efficace et la systématiser : les caractères mobiles en plomb et leur principe de fabrication, la presse typographique, inconnue des Orientaux, et l’encre grasse nécessaire à cet usage.
« L’information n’a jamais été stable. Cela pourrait servir de correctif à la croyance que l’accélération des médias échappe à tout contrôle. [...] Les techniques nouvelles de communication devraient nous contraindre à reconsidérer la notion même d’information. Plutôt qu’à des documents solidement établis, nous avons affaire à des textes multiples et changeants. » (Darnton, 2011, p. 80)
La lente stabilisation du modèle imprimé : de la nécessité de construire des standards
Attention à ne pas trop fantasmer la « révolution » de l’imprimé : jusqu’au XVIIIe siècle, il est très prématuré de parler de « stabilisation » des textes et, à plus forte raison, de « démocratisation » du livre. L’étude historique des premiers temps de l’imprimerie peut nous en apprendre beaucoup sur ce qui se produit aujourd’hui avec le numérique - technologie pleine de promesses, au potentiel élevé, mais pour laquelle on cherche encore à trouver des formats stables et des systèmes de standardisation.
L’exemple de l’édition des In Folio de Shakespeare
Dans Le Premier Folio de Shakespeare, 18 des 36 pièces éditées sont inédites (elle n’ont jamais fait l’objet d’une publication auparavant). Le Premier Folio constitue donc une source essentielle pour connaître l’oeuvre originale de Shakespeare. Pourtant, il existe de multiples « versions » de ce Premier Folio, réalisé chez le même imprimeur, à peu près au même moment.
« Les techniques nouvelles de communication devraient nous contraindre à reconsidérer la notion même d’information. Plutôt qu’à des documents solidement établis, nous avons affaire à des textes multiples et changeants. » (Darnton, 2011, p. 80)Les imprimeurs ont commencé par eux-mêmes à mettre en place un certain nombre de standards pour l’édition des textes de théâtre. L’idée même, pour un auteur, d’avoir une version définitive de son texte, qui devient alors son « oeuvre », est sans doute davantage le résultat de cette standardisation du livre, que le résultat de leur volonté propre. Entre l’invention de l’imprimerie et le développement de l’édition moderne, l’éditeur était encore une figure qui se confondait avec celle de l’imprimeur, voire celle du libraire. Il n’existait pas de standard encore bien établi
Même en procédant à l’étude philologique des différentes versions du texte et des versions archéologiques du Premier Folio, le principe d’une édition définitive et originale restituant la vérité du texte est parfois utopique : Le Roi Lear, par exemple, compte aujourd’hui deux versions !
L’ère de la communication électronique
La fin du livre ?
Pour Robert Darnton, on peut reconnaître quatre temps dans l’évolution des technologies de l’information :
- l’invention de l’écriture
- l’invention du codex
- l’invention de l’imprimerie
- l’âge de la communication électronique
Les formes d’écriture et les supports d’inscription ont joué un rôle déterminant sur notre système de pensée, qu’ils ont contribué à façonner.
La démocratisation du livre ?
Il faut prendre garde à ne pas tomber dans la logique du « grand remplacement » , en supposant qu’il y aurait une seule représentation numérique du texte venue remplacer les éditions imprimées multiples. Numériser un livre n’est pas tout à fait la même chose que numériser un texte : il est important de rendre compte de la réalité médiatique du livre.
Des incunables numériques ?
Nous sommes aujourd’hui en train de produire nos propres incunables numériques : nous cherchons encore la forme idéale pour le livre de demain. Il est donc important de s’entendre sur des standards à établir, afin d’assurer la pérennité des livres numériques que nous produisons aujourd’hui.